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496. Lexpert est appelé dans une commune arpentée, à leffet de déterminer le revenu imposable de cette commune, par lestimation de toutes ses propriétés.
497. Lexpert commence ses opérations aussitôt quon lui a remis latlas portatif ou la copie de la minute du plan (304), et le tableau indicatif des diverses propriétés (287), lequel tableau donne la connaissance de la contenance du territoire, de sa division en sections, et des différentes natures de propriétés que contient chaque section.
498. La première opération de lexpert est la modération à faire au relevé du prix des grains et denrées, à raison de leur transport au marché.
499. Lexpert ne doit pas baser ses déductions sur les prix actuels, mais sur le prix moyen des quinze années comprises dans les mercuriales.
500. Cette modération ne doit pas être calculée précisément sur ce quil en coûterait pour un transport spécial ; elle doit être très-faible, attendu que les chariots et les animaux qui sont employés aux transports, servent aux travaux de lagriculture et entrent dans les frais dexploitation.
501. Les communes qui consomment les denrées quelles produisent, ont droit aux déductions pour les frais de transport, si le prix des denrées est établi pour elles daprès le tarif dressé pour le chef-lieu de marché dont elles sont plus voisines.
502. Dans les communes qui ont un marché, il ne doit être fait aucune déduction pour les frais de transport.
503. Le tarif définitif du prix des grains et denrées est établi au verso du relevé ; il présente, dans une première colonne ; le prix constaté par le relevé ; dans la seconde, la modération faite pour frais de transport au marché, et dans une troisième colonne ; le prix des denrées, déduction faite des fais de transport.
504. Comme tous les calculs du produit brut et des déductions pour arriver au produit net, sont faits en mesures locales dans le tableau de classification, il est indispensable de présenter un tarif, I° en mesures anciennes, 2° en mesures nouvelles.
505. Lexpert motive, au bas du tarif, les déductions quil a jugées nécessaires ; il indique exactement les distances, létat des chemins, les usages suivis pour le transport au marché, les hommes et les bêtes quon y emploie, et enfin la quantité des grains et des denrées que les bêtes peuvent transporter.
506. La classification consiste à déterminer en combien de classes chaque nature de propriétés doit être divisée, à raison des divers degrés de fertilité du terrain et de la valeur du produit.
507. Il ne faut pas confondre cette opération avec le classement, qui consiste à distribuer, entre les classes établies par la classification, tous les terrains que chaque propriété occupe(546).
Ainsi on classifie les cultures, on classe les parcelles ; et le classement est lapplication de la classification à chaque partie du territoire.
508. Lexpert fait la classification de chaque genre de propriétés et de chaque nature de culture, en se transportant successivement, avec le contrôleur, le maire, sil veut bien sy prêter, et lindicateur, sur chaque section.
509. Le tableau de classification est une des pièces les plus importantes de lexpertise, puisquil doit présenter tous les calculs faits par lexpert pour parvenir à la connaissance du produit net.
510. Le nombre de classes est limité à cinq pour les terres labourables, à trois pour les autres natures de cultures : cependant, pour les cultures prédominantes ou qui présentent un grande variété, lexpert peut porter le nombre de classes de quatre à cinq ; mais il ne doit user de cette latitude quavec beaucoup de réserve.
511. Lexpert néglige les différences légères ; sur-tout il ne compte pour rien celles qui ne proviennent que dune culture mieux entendue ou dune plus grande avance de fonds.
512. La qualification de Ire , 2e, 3e, 4e, et 5e classes, na de rapport quà la comparaison des terrains de la commune entre eux, et non avec ceux des autres communes du canton, ou de larrondissement, ou du département ; telle terre est de Ire classe dans la commune où elle est située, qui serait peut-être de 5e classe dans lensemble des communes du canton.
513. A la suite de la définition de chacune des classes de chaque nature de culture, le contrôleur et lexpert indiquent spécialement et nominativement une terre de cette nature et de cette classe, pour servir de point de comparaison et être une espèce détalon de ce quils entendent par terre de telle nature et de telle classe ; exemple :
Après la définition de la terre labourable de première classe, il sera ajouté : Telle est, section , la pièce appartenant à , située canton ou triage de , N° , tenant vers le nord à , et vers loccident, à .
Et de même pour les autres classes et les autres cultures.
514. Le tableau de classification est rédigé conformément au modèle. On na pu donner dans ce modèle un exemple applicable à toutes les natures de culture ; on a choisi les plus générales.
Le directeur de chaque département doit éclairer lexpert et le contrôleur sur la marche quils ont à suivre pour lévaluation des natures de culture particulières à leur département ; mais ils doivent se renfermer dans ce principe constant, quil faut toujours présenter le produit brut, et à la suite les déductions pour frais de culture, semence, engrais et récolte.
515. Les déductions à faire(324, 325, 326, 327), doivent être détaillées le plus possible ; cependant il faut éviter den présenter qui, entrant les unes dans les autres, feraient un double emploi.
Si, pour la culture des terres des dernières classes, on établissait les mêmes frais que pour celles de première classe, le produit non-seulement serait absorbé, mais encore se trouverait au-dessous des frais ; et lon ne peut pas admettre quun propriétaire cultive des terres qui ne lui rendraient aucun produit, mais qui tous les ans diminueraient son capital
516. Il convient dobserver que les dernières classes étant cultivées avec les bestiaux du domaine et les domestiques qui y sont attachés, les frais de leur exploitation rentrent, en majeure partie, dans les frais dexploitation des premières classes : ainsi, après avoir établi avec soin les frais de culture des premières classes, ce nest que comparativement au produit brut que lon doit ensuite les établir pour les autres classes.
Par exemple, les frais de la première classe se sont élevés à la moitié du produit brut ; ceux des autres classes ne doivent pas être au-dessus de la moitié de leur produit brut.
517. Néanmoins, lorsque lexpert aura lintime conviction que, par leffet de cette déduction proportionnelle, lévaluation des dernières classes est trop élevée, il peut laffaiblir en énonçant ses motifs.
518. Les déductions pour engrais ne peuvent avoir lieu, lorsquon nen achète point ; les pailles récoltées, nentrant point dans lévaluation du produit net, tiennent lieu de cette déduction.
519. Lorsque les engrais sont achetés, ils doivent entrer en déduction ; mais, pour en fixer la quotité, lexpert se tromperait évidemment, si, après avoir reconnu quon emploie cinq charrois de fumier pour un arpent de vigne, il portait en déduction le prix de ces cinq charrois.
520. Lexpert doit donc sassurer comment les engrais sont employés. Par exemple, on emploie cinq charrois dans un arpent de vigne, mais tous les cinq ans seulement ; alors cest le prix dun charroi quil faut déduire, et non celui de cinq.
521. En général les frais de transport et de placement des engrais sur les terres labourables ne donnent lieu à aucune déduction, attendu que, dans la plupart des départements, ils sont compensés par le produit des pailles qui nentrent point dans lévaluation.
Néanmoins, lorsque lexpert croit que les pailles ne suffisent pas pour compenser ces frais, il peut en faire la déduction, mais elle ne doit pas excéder le prix dun labour.
522. Pour le marnage, il faut sassurer de même de sa durée, et, si cette durée est de trente ans, il faut diviser les frais quoccasionne le marnage par trente, et ne porter en déduction que le trentième.
523. Lexpert ne doit pas perdre de vue quoutre les déductions ordinaires, il est des dépenses extraordinaires particulières à quelques propriétés.
Des terrains exposés aux inondations, des terrains en pente rapide, dautres soutenus, garantis et rendus fertiles par des ouvrages dart, nécessitent des frais extraordinaires : là, il faut fréquemment rapporter les terres déplacées ou enlevées ; ici, il faut réparer, réédifier, entretenir les ouvrages qui servent dappui et conservent la propriété.
Comme ces déductions sont particulières et ne peuvent influer sur lévaluation dune commune, lexpert doit prendre en considération ces dépenses extraordinaires, en faisant le classement.
Quant aux dépenses extraordinaires qui tendent à obtenir des produits extraordinaires, ni les produits ni les dépenses ne sont pris en considération.
524. Lévaluation des vignes exige beaucoup de soins(344). Les principes en ont été établis(345 à 348).
525. Dans les pays où il est dusage déchalasser les vignes, lexpert doit sassurer de la durée de léchalassement, et déduire le dixième des frais déchalas, sils se renouvellent tous les dix ans.
Il nest fait aucune déduction pour la taille des vignes et pour les frais de vendange, attendu quon ne calcule ni les bois ni les revins.
526. Lexpert évalue et classifie les prés daprès les principes qui ont été établis (356 à 360).
527. Les propriétés grevées dun droit dusage, telles que les prés grevés dun droit de parcours, dont la première herbe appartient au propriétaire, et la seconde, soit aux habitants de la commune, soit à dautres particuliers, doivent être évaluées en raison du produit total de la terre, sauf au propriétaire à se faire tenir compte de la portion dimposition qui frappe sur la partie dont il, ne jouit pas, à moins quil ny ait un titre contraire.
Cette disposition rentre dans le principe général que chaque propriété doit être évaluée sans égard aux charges dont elle est grevée (329).
528. Lévaluation des bois taillis en coupes réglées offre peu de difficultés : il sagit de constater la quantité de bois que donne la coupe annuelle, et de lévaluer daprès le tarif du prix des denrées. Il reste à faire ensuite la déduction des frais de garde, dentretien et de repeuplement (365).
529. Les bois taillis non en coupes réglées sévaluent daprès leur comparaison avec ceux en coupes réglées situes dans la commune ou dans le canton ; et sil ne sen trouvait pas, daprès la quantité de bois que peut produire chaque arpent, ayant égard à la nature du sol et à la qualité des arbres.
530. Les bois de haute futaie ne sévaluent quau taux des simples taillis (368) ; néanmoins lexpert en fait une classification séparée, attendu quil est possible que les terrains où sont situes ces bois soient dune qualité supérieure ou inférieure à ceux des bois taillis (369), ou soient dans un autre rapport entre eux.
531. Les bois séquestrés, et les bois nationaux aliénables, cest à dire, dune contenance inférieure à trois cents arpents métriques, doivent entrer dans la classification des taillis ou des futaies, le classement doit aussi en être fait ; mais leur évaluation nest que pour mémoire, sauf à entrer dans lallivrement, si, par la suite, ces bois sont restitués ou vendus.
532. Les bois de pins, de sapins, les châtaigneraies, olivets, plants de mûriers, oseraies, aulnaies, saussaies et autres plantes analogues, sont lobjet dautant de classifications particulières (371, 375), à moins que, ne se trouvant quaccessoirement et en petite quantité sur un terrain, ils nen soient pas la culture dominante (363, 364).
533. Il en est de même des rizières, cultures en maïs, houblonnières, chènevières, champs de tabac, de colzat, de pommes de terre, &c. Ces cultures diverses forment des classifications particulières, à moins que, nétant que momentanées, elles nentrent dans lassolement des terres (376).
534. Enfin, les champs consacrés à plusieurs cultures dont aucune nest dominante, sont lobjet dune classification particulière sous le nom de cultures mêlées (374).
535. Le mode dévaluation des maisons ne présente aucune difficulté : lorsque la valeur de quelques-unes est constatée par des baux, lexpert évalue les autres par comparaison, et en suivant la proportion qui résulte de leur étendue et de leur situation (391, 392, 393).
Il doit indiquer les maisons dont il a les baux et quil a prises pour termes de comparaison.
536. Lorsquil nexiste aucun bail, lexpert doit sattacher à reconnaître la valeur locative : il trouve cette valeur en combinant létendue des maisons, leur situation, les commodités quelles présentent et le nombre de pièces dont elles sont composées : lexpert doit enfin déclarer le prix quon pourrait en espérer dun particulier qui se présenterait pour les louer.
537. Il peut arriver, surtout dans les campagnes, que les premières classes ne comprennent quune ou un très petit nombre de maisons ; pour les classes inférieures, les comparaisons sont plus faciles, parce que les hommes de même profession se logent convenablement aux besoins et aux facultés de leur état, et que leurs habitations occupent à peu près le même terrain.
538. Pour estimer les maisons dans des proportions convenables, lexpert doit commencer par les plus basses classes, en remontant aux classes supérieures graduellement par comparaison.
539. Les maisons des villes, des bourgs et des communes très peuplées, ne sont pas susceptibles dêtre divisées en classes ; chaque maison est évaluée séparément.
540. Dans les communes rurales, les maisons peuvent être divisées en dix classes au plus : lorsque la commune contient des maisons que la variété de leur produit ne permet pas de réduire en dix classes, on suit le mode adopté pour les villes (539).
541. La division en classes nest point applicable aux usines, fabriques, manufactures, &c. ; chaque usine doit être évaluée séparément.
542. Dans aucun cas lexpert ne peut évaluer les maisons au-dessus du minimum fixé par la loi (393).
543. Lexpert ne doit pas évaluer les maisons, uniformément et sans distinction, au minimum fixé par la loi ; de semblables évaluations sont évidemment infidèles.
Lévaluation au minimum ne doit avoir pour objet que de misérables chaumières ou des maisons dans un état de dégradation absolue.
544. Les bâtiments servant à lexploitation rurale nétant évalués quà raison de leur superficie (396), et la valeur de lédifie nentrant point dans la classification, il ny a pas lieu non plus à faire ni la déduction du quart ni aucune autre déduction pour les frais de leur entretien.
545. Le modèle du tableau de classification est rempli dexemples fictifs. Ce modèle annonce que tous les calculs quil présente doivent être faits en mesures locales.
546. Après avoir déterminé le nombre de classes de chaque genre de propriétés, et préparé lestimation de chaque classe, lexpert soccupe du classement, qui consiste à distribuer entre les classes établies et reconnues, tous les terrains que chaque genre de propriété occupe, et à déterminer de quelle classe est chaque parcelle ou portion de parcelle
547. Lexpert ne doit jamais perdre de vue un principe général, qui souffre très peu dexceptions, cest que la contribution foncière natteint point lindustrie extraordinaire du cultivateur ; et que, par une juste conséquence, elle est sans égard pour sa négligence.
548. Lexpert doit donc rechercher avec attention la cause des différences quil aperçoit, et sassurer si ces différences dérivent dune culture bien ou mal soignée, relativement aux travaux agricoles usités dans le pays, ou bien si elles sont inhérentes à la qualité ou à la situation du sol. Ce nest que dans ce dernier cas quil doit faire une distinction.
549. Lexpert, assisté du contrôleur qui doit être muni du plan et du tableau indicatif (497), se transporte successivement sur toutes les parcelles, examine et décide la classe dans laquelle chacune delles doit être rangée en totalité ou en partie ; et le contrôleur en porte lindication dans la colonne de létat de classement à ce destiné.
550. Le contrôleur, qui tient le tableau indicatif, doit, à mesure quil arrive sur une parcelle, lire la ligne quelle occupe sur le tableau, appeler les noms, prénoms et professions des propriétaires, la nature de culture et la contenance, et tenir des notes de toutes les erreurs que lui ou lexpert découvriraient, ou dont lindicateur le ferait apercevoir.
551. Il peut être très utile au contrôleur, lorsquil rencontre une parcelle dépendante dun bail dont il a le relevé, de porter, au crayon, sur le tableau indicatif , à la suite de cette parcelle, le numéro du bail ; cette méthode facilite la rédaction du tableau de lapplication du tarif aux biens compris dans les baux.
552. Lexpert estime le revenu locatif de toutes les propriétés bâties, sans égard à la superficie ; et faisant ainsi mentalement la déduction (391), le contrôleur na plus à faire.
553. Lorsque le classement des parcelles est terminé sur le terrain (549), lexpert finit son tableau de classification, et procède à la rédaction du tarif provisoire.
554. Ce tarif présente les résultats de la dernière colonne du tableau qui est à la fin de la classification, cest-à-dire, le revenu net de larpent métrique de chaque nature et de chaque classe de propriétés.
555. Lapplication des baux est une opération très essentielle de lexpertise ; elle fait lobjet dun tableau rédigé par le contrôleur (628)
556. Il serait très dangereux de ne faire dans une commune que lapplication dun petit nombre de baux ; une semblable application pourrait donner lieu à des erreurs considérables.
En conséquence, lexpert doit faire la ventilation de tous les baux, à moins quil ne sen trouve pour lesquels cette opération soit absolument impossible, ou quil ny en ait qui soient reconnus suspects ou exagérés.
557. Les prix des baux doivent, en général, être le régulateur des évaluations, parce quen général la somme stipulée par le bail est le revenu que le propriétaire retire de son bien. Ce principe est cependant susceptible de plusieurs modifications.
558. En effet, comme le cadastre évalue le produit moyen imposable des biens, et que les évaluations résultent dun tarif applicable à toutes les propriétés, il est impossible que le revenu assigné à un propriétaire par le cadastre, cadre jamais parfaitement avec le prix de son bail.
559. Il doit résulter encore de ce produit moyen, que les biens affermés à un prix exagéré sont estimés au dessous de ce prix , et que ceux affermés à un prix trop modique sont plus évalués.
560. Aussi lexpert doit avoir soin de prendre des baux de toutes les espèces , de manière à ce quil y ait compensation entre ceux qui sont exagérés et ceux qui sont affaiblis.
561. Une commune est exploitée partie en grande tenue et parties en petite tenue. Un bail dune grande tenue porte la valeur des terres à 38 francs ; une autre bail de petite tenue la porte à 52 francs. Cependant et les autres sont de même qualité ; la différence ne vient que de ce quun propriétaire à petite tenue trouve à affermer plus avantageusement que le propriétaire à grande tenue.
562. Dans ce cas, on peut évaluer le bien en petite tenue et celui en grande tenue, séparément et chacun daprès les baux qui lui sont particuliers, dabord, parce que la qualité de la terre est la même , ensuite, parce que lon ne peut pas faire deux classifications dans le même commune.
Il est possible, dailleurs, que celui qui afferme en grande tenue, vienne à diviser son domaine en petite tenue ; son évaluation alors resterait à 38 francs, pendant que celle des autres propriétaires en petite tenue serait de 52 francs. Il en serait de même de plusieurs domaines à petite tenue, qui , réunis en grande tenue, se trouveraient évalués à 52 francs, pendant que les autres n le seraient quà 38 francs.
On doit donc prendre le terme moyen de ces deux estimations, cest-à-dire, 45 francs.
563. En ce cas, on fait, à la vérité, supporter aux propriétaires en grande tenue une augmentation de 7 fr., et les propriétaires en petite tenue reçoivent une diminution de pareille somme.
Ce dernier système nest nullement injuste, comme il pourrait le paraître au premier aspect.
Le but quon se propose dans lévaluation dune commune, est datteindre le taux moyen du produit des terres ( 559) ; et la loi dit positivement quon naura aucun égard au plus ou moins dindustrie des propriétaires ; cest une industrie que de diviser son domaine en petite tenue, et cest une raison de convenance qui porte une autre propriétaire à affermer le sien en grande tenue.
564. Le propriétaire dun bien affermé en grande tenue ne peut donc réclamer contre son évaluation, sous prétexte quon lui assigne un revenu plus fort que celui quil retire réellement de son bail. Ce revenu, constaté par le cadastre, est celui dont son domaine est naturellement susceptible ; et le sacrifice quun propriétaire fait, par un motif quelconque, à son fermier, ne peut préjudicier à létat ou plutôt à la masse des contribuable.
Lévaluation cadastrale dun bien affermé, peut dailleurs éclairer le propriétaire sur le revenu quil peut raisonnablement espérer de son domaine, et le mettre en état daffermer par la suite ce bien dune manière plus avantageuse.
565. Il résulte des principes ci-dessus, que si, dans un canton où les baux en grande et petite tenue ont lieu, une commune ne présentait que des baux de la première espèce, et une autre des baux de la seconde, lexpert peut toujours consulter ces baux, mais ne doit pas les prendre pour régulateur absolu. Il doit alors sen tenir au tarif provisoire, ou le modifier par la comparaison des expertises des communes voisines où il se trouve des baux des deux espèces.
566. Dans les communes où les biens safferment à des prix très inférieurs à leur produit réel, soit parce que le fermier a contribué à lacquisition du domaine et en usage local quelconque, ces baux doivent être entièrement rejetés ; lexpert doit évalué les biens daprès le produit dont ils sont naturellement susceptibles, sauf au propriétaire à réclamer de son fermier, sil sy croit fondé, la part de contribution qui frappe sur la portion de revenu dont jouit ce dernier.
Ceci est encore une application du principe général, que chaque propriété doit être évaluée, sans égard aux charges dont elle est grevée (329)
En général, les fermiers étant chargés du paiement de la contribution, ils supportent par le fait la part de cette contribution pour la portion quils ont dans le revenu net imposable.
567. Lexpert ne doit pas perdre de vue que la proximité des grandes villes ajoute une valeur considérable aux terres, par la facilité quont les propriétaires et fermiers.de se procurer des engrais qui en améliorent la qualité, et par le débit plus prompt et plus avantageux de leurs denrées.
568. Si un bail sécarte trop de lestimation, cest une indication presque certaine quil est simulé ou accompagne dun pot de vin ou une contre lettre, et il doit être rejeté.
569. Dans le cas où lon manquerait de baux, il est un moyen qui peut être employé avec avantage, cest de recourir aux baux des communes voisines. Il convient seulement de nen faire usage que lorsquil est reconnu quil existe des rapports entre les propriétés des unes et des autres communes.
570. Le prix dun bail se compose, non seulement la somme stipulée en argent, mais encore de toutes les charges et redevances dont le fermier peut être tenu, telles que grains, volailles, charrois, contributions, &c.
571. Lexpert doit en présenter le tableau, en évaluant les redevances en denrées daprès le prix des mercuriales, et les autres charges daprès le prix notoirement connu.
572. Quant aux contributions, la justice veut quon ajoute au prix du bail celles de la première année de ce bail ; mais comme il est souvent impossible de constater le montant des contributions antérieurs à 1800, alors, et dans ce cas seulement, il faut ajouter au prix du bail la contribution établie en 1800, ou celle de lannée courante.
573. Quoique dans lévaluation des revenus on ne déduise rien pour lentretien des bâtiments servant à lexploitation rurale, attendu quon nestime que la superficie de ces bâtiments et non leur élévation (396), il nen est pas moins juste de déduire sur le prix du bail la somme quexige réellement lentretien de ces bâtiments, attendu quils ont dû influer sur le prix de ce bail.
On ne pourrait, en effet, comparer le prix dun bail où lélévation des bâtiments entre pour quelque chose, avec le résultat dune classification où cette élévation nest entée pour rien.
574. La dépense de lentretien des bâtiments ruraux doit varier beaucoup, et surtout entre les pays de grande et ceux de petite culture. Dans les premiers, un seul corps de ferme suffit pour une très grande exploitation ; dans les autres, chaque ferme nexploite quune petite portion de terre. Dans les uns et dans les autres, ma culture est plus ou moins divisée. Il est dès lors impossible de fixer une règle générale pour ces déductions. La règle doit varier, en quelque sorte, de commune à commune.
575. Lexpert constate la portion des bâtiments ruraux attachée et nécessaire à chaque exploitation ; et calculant ce que leur entreten peut coûter pendant dix ans, sans examiner leur état naturel et leur plus ou moins de vétuste, il doit tirer le taux moyen de cette dépense annuelle, et la déduire sur la totalité du prix de chaque bail.
576. Lexpert doit mettre le plus grand soin à cette déduction, et en détailler les motifs dans son tableau dapplication.
577. Cette déduction doit avoir lieu sur les baux par lesquels lentretien des bâtiments reste aux frais du propriétaire, mais non ceux par lesquels le fermier sen est chargé. Il est évident, dans ce cas, que le fermier ; à raison de cette charge, a diminué le prix de sont bail, et que la déduction est faite davance.
578. Si, dans une commune, il se trouve des baux des deux espèces ci dessus, la déduction ne doit avoir lieu que sur ceux de la première.
579. La loi quil sera déduit, sur le produit brut des maisons dhabitation, un quart e leur valeur locative, pour tenir lieu des réparations et entretien, et un tiers pour les usines (392, 397).
Cette déduction doit également avoir lieu sur le prix du bail, lorsquune maison dhabitation ou une usine en fait partie ; si cette déduction navait pas lieu, le résultat de la ventilation ne pourrait être exact.
On suppose, en effet, un bail dune maison louée 600 francs ; cette somme est le produit brut.
Dans son tarif provisoire, lexpert la évaluée 450 francs en produit net.
Si lon compare lévaluation au prix du bail, on trouve une différence de 150 francs.
Cela vient de ce que lon compare un produit net à un produit brut, et quon aurait dû déduire 150 francs sur le prix du bail.
580. Il faut donc, pour opérer avec justice, après avoir fait lapplication du tarif provisoire à toutes les propriétés comprises dans le bail, déduire du prix du bail le tiers de la somme pour laquelle la maison aura été comprise dans lapplication du tarif provisoire : ce tiers revient au quart du produit brut ; et pour les usines, il faut porter en déduction la moitié de la somme pour laquelle elles auront été comprises dans lapplication du tarif provisoire, cette moitié revenant au tiers, qui doit être déduit.
581. Lorsque le propriètaire a fourni au fermier des bestiaux et instruments aratoires, il doit être déduit, sur le prix du bail, lintérêt de la valeurs de ces objets, mais seulement à raison de cinq pour cent.
582. Lexpert examine quelles sont les autres charges dont le propriétaire pourrait être tenu, et il en faut la déduction.
583. Lorsque lexpert a choisi les baux quil veut employer, et a établi leur prix définitif par l augmentation des charges actives et la diminution des charges passives, il procède à leur ventilation.
A cet effet, il constate la contenance de chacune des parcelles comprises dans le bail, la nature de sa culture et la classe qui lui est assignée par le classement.
Il applique ensuite son tarif provisoire à chacune de ces parcelles.
584. Si le bail contient en terres labourables un arpent de première classe, deux arpents de seconde classe et cinquante perches de troisième ; plus, en pré, deux arpents de première classe, et un arpent de seconde ; plus, dix perches de jardin première classe, et quatre perches de maison, superficie de première classe de terres labourables ;
Et que le tarif provisoire donne les évaluations suivantes :
Terre labourable .1er classe ..100
2e classe 80
3e classe 50
Vigne ..1er classe . 150
2e classe 120
Jardin .1er classe .100
Maison , superficie ..100
Maison, élévation 60
Lexpert fait l application de cette manière :
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585. Si le bail est de 800 francs, lexpert conclut que ses évaluations provisoires sont trop faibles ; sil nest que de 700 francs, il en conclut quelles sont trop fortes.
Mais cest sur lensemble des baux, et non pas sur un seul bail, quil doit chercher ce résultat.
586. Lexpert, après avoir établi les évaluations résultant du tarif provisoire et celles résultant des baux, peut adopter définitivement les premières ou les secondes, ou prendre un taux intermédiaire.
587. Dans le cas où lexpert aurait suivi la proportion daugmentation ou de diminution donnée par les baux ; dans celui où il aurait fait frapper laugmentation ou la diminution dune manière différente sur les diverses natures ou classe de propriétés, enfin dans celui où il aurait maintenu ses évaluations provisoires, quoique inférieures ou supérieures au prix des baux, il doit en consigner les motifs dans le tableau dapplication.
588. Lexpert qui saperçoit, après la comparaison des baux, quil na pas observé une proportion exacte dans les évaluations de chaque nature et de chaque classe, peut se rectifier, en faisant frapper laugmentation ou la diminution, dans une proportion plus forte ou plus faible, sur la nature de culture ou sur les classes qui lui en paraîtraient susceptibles : lexpert doit seulement ne pas faire frapper cette diminution ou augmentation sur des objets tels que maisons, moulins ou fabriques dont les évaluations auraient été basées sur des baux.
589. Les résultats de lapplications du tarif provisoire aux propriétés comprises dans les baux, et des évaluations définitives de lexpert, sont consignés dans un état final, qui présente, en autant de colonnes,
1° Toutes les natures de propriétés, et les classes entre lesquelles elles se divisent ;
2° Le revenu net imposable pour chaque nature de propriété et chaque classe, suivant le tarif provisoire ;
3° Le revenu suivant le résultat des baux ;
Et 4° ce revenu suivant les évaluations définitivement adoptées par lexpert.
590. Lexpert consigne dans le tableau dapplication des baux, les motifs qui lui ont rejeter tels ou tels baux, ainsi que ceux daprès lesquels il aurait pense ne pas devoir admettre en totalité la différence en plus ou en moins résultant de leur application.
Par exemple, lapplication des baux a fait connaître que laugmentation sur le tarif provisoire doit être de 25 centimes pour franc ; lexpert a jugé quelle ne doit être que de 15 centimes : il doit en expliquer les motifs.
591. Le contrôleur joint aux pièces de chaque expertise une expédition du relevé des baux annotant ceux qui ont été rejetés, afin quil soit facile de constater si la ventilation de tous les baux compulsés a été faite, et dapprécier les motifs de rejet de ceux qui nont pas été employés.
592. Lapplication du tarif provisoire aux baux (555) ne peut avoir lieu dans les départements où le fermage en argent est remplacé par le colonage à portion de fruits, ou par un autre mode dexploitation analogue.
Lexpert peut néanmoins et doit faire tout le travail prescrit par les articles précédents (583 à 589), en opérant sur quelques domaines situés dans la commune, et exploités suivant le mode le plus usité.
Il constate, que pour chacun de ces domaines, la portion de fruits que retire le propriétaire; et la convertit en argent, daprès le tarif du prix des denrées.
593. Le revenu du propriétaire ne se compose pas seulement de la portion de fruits stipulée, mais encore des charges dont le fermier peut être tenu (570) ; lexpert doit en présenter le tableau, en évaluant daprès les prix notoirement connus (571).
594. De même, le revenu du propriétaire saffaiblit de toutes les charges quil a contractés envers le colon (573, 579, 581, 582) ; lexpert doit également faire le tableau de ces charges, les évaluant daprès les prix notoirement connus.
595. Par ces procédés, lexpert a le revenu du propriétaire, tel que le lui donnerait un bail en argent ; il procède alors à la ventilation de ces domaines et à lapplication du tarif provisoire, absolument de la même manière que pour les baux (583 à 585).
596. Après avoir établi les évaluations résultant du tarif provisoire, et celles résultant des domaines pris pour comparaison, lexpert adopte définitivement les premières ou les secondes, ou un taux intermédiaire (586) ; et il énonce les motifs de sa détermination (587).
597. Les résultats de cette application sont consignés dans un tableau à trois colonnes (589).
598. Quoique la valeur vénale soit une mesure bien fautive pour évaluer absolument le revenu dune propriété quelconque, elle peut être utilement consultée pour estimer, relativement et par comparaison, les produits des divers genres de propriétés.
Si , par exemple, il résulte de la valeur vénale moyenne, constatée par les actes de ventes, ou indiquée par la notoriété publique, que, dans une commune, on vend, en général,
Larpent de terre labourable . 1,200 f
Larpent de pré . 2,400
Larpent de vigne .. 1,800
Et larpent de bois 800
Lexpert peut en conclure que ces quatres espèces de biens sont entre eux dans la proportion de 24, 12, 18, 8 ; que les prés doivent être évalués à un revenu double de celui des terres labourables, les vignes aux trois quarts des prés, et les bois au tiers seulement.
Si son tarif ne donne pas ces mêmes proportions, lexpert peut le réformer.
599. La valeur vénale peut être utile pour estimer la plus-value quun terrain planté soit en arbres fruitiers, soit en vignes, ou consacré à une culture particulière, doit avoir sur un terrain de même qualité, mais nu et employé à la culture ordinaire.
600. La connaissance de la valeur vénale nest donc par à négliger comme renseignement, mais ne peut être admise comme règle.
601. Ce tarif est déjà formé dans la dernière colonne du tableau dapplication des baux (589).Il ne sagit que de le rédiger dans la forme du modèle.
602. Dans quelques départements, on avait pensé que , puisquon faisait sur les prix des baux la déduction des frais de lentretien des bâtiments ruraux, on devait, pour les communes où il ny a pas de baux, déduire ces mêmes frais dentretien sur le tarif définitif ; cest une erreur.
Daprès les principes développes ci-dessus (544, 573) ; les bâtiments ruraux nentrant point dans la classification, ne doivent point donner lieu à une déduction ; ils sont nuls, sous les deux rapports, dans la formation du tarif provisoire.
603. Pour faciliter les calculs, il importe de faire disparaître dans les fractions de franc de dernier chiffre, et de le remplacer par un zéro ; de manière que ces fractions présentent toujours des décimales entières, telles que 10, 20, 30 centimes ; par exemple, lorsque le tarif donne des fractions 11, 12, 13 et 14, et on met seulement 10 centimes ; lorsquil présente 15, 16, 17, 18, 19, on met 20 centimes.
604. Ce procès-verbal nest autre chose que le narré des diverses opérations de lexpert, lénonciation des tableaux qui composent lexpertise, et lattestation de leur vérification.
605. Le contrôleur doit le terminer en spécifiant que lexpert a estimé les maisons, les usines, manufactures, &, à tant, sans y comprendre ni la superficie les maisons, ni les bâtiments ruraux de dépendances.
606. Les experts ne peuvent ajouter aux tableaux des expertises aucune colonne destinée à offrir lindication des améliorations possibles. Lintention du Gouvernement est de chercher, par la fixité de limpôt, à ôter à lagriculteur la crainte daugmenter son imposition en améliorant les terres. Il importe que les experts dissipent à cet égard les craintes des cultivateurs, et quils fassent connaître que lun des principaux avantages du cadastre est de fixer lallivrement de chaque propriété, cest-à-dire, son revenu imposable 16), de manière quil ne puisse augmenter, quand même le revenu foncier augmenterait par lindustrie du cultivateur.